23 novembre 2007

Accueil - Cherchez d'abord le royaume....

"Cherchez d'abord le royaume,

et le reste vous sera donné par surcroît"


"Eveille toi de ce sommeil et des songes mauvais. Tu ne vois de toi-même, à certaines heures de vérités, que les échecs et les défaites, les chutes, les souillures, peut-être les crimes. Mais tout cela, ce n'est pas toi. Ce n'est pas ton vrai "moi", ton "moi" le plus profond."

"Amour sans Limites" d'un moine de l'Eglise d'Orient



Qui suis-je ?

Souffrance - Amour - Guérison

La maladie d'amour
Le sens de la souffrance
De l'amour souffrance à l'amour accompli
Me nettoyer l'âme au Kärcher
La voie royale de la guérison de l'âme
Elle n'aura plus jamais soif
Du sublime dans l'abîme-Va vers toi !
A tous les pots félês ....

Art sacré
À l’époque où mon âme se cherchait (Chant Divna Ljubojevic)
La musique de la Bible révélée
L'artiste
Montre-moi ta face
L'amour est art
Un nom pour Dieu ?
Trouver l'âme soeur
Une main qui donne

Méditation - Intériorité
Rendez-vous
Méditer dans le souffle de Dieu
La sensation du divin
La prière de Jésus
Miroir de l'âme

Remettre sa vie en route
J'ai quitté le monde et son bruit
La conscience de la vie intérieure
Devenir adulte

Spiritualité
L'arbre cosmique
De l'extérieur à l'intérieur, de l'intérieur au supérieur
Le langage de Dieu est le silence
La mystique de la Lumière
Mariage
Célibat
Sexualité et sacramentalité
L'Eros et la vieillesse
Sous la guide de l’Esprit
Le visage de la joie
De la mort ...

Chrétienté
Vision biblique de la beauté (Paul Evdokimov)
Le mystère de la Colombe
La naissance de Jésus
Adam et Eve
Tout ce qu'Il vous dira, faites-le
Souffrance sans limites
Ascèse de l’Amour
A tout je dis : oui !
Pourquoi ?
La fleur de la liberté
Traversée du désert
Le pédagogue des mystères de l'Au-delà
























16 septembre 2007

Le pédagogue dans les mystères de l’Au-delà



La vraie vie est toute proche de nous, comme une ombre heureuse…
C’est un geste invisible qui nous relève, une intuition, une parole discrète,un avertissement qui traverse nos rêves,
c’est une joie soudaine qui permet d’entreprendre,
c’est la rencontre imprévisible qui remet tout en place dans notre vie,
c’est l’affirmation forte et sereine que tout est racheté si nous le croyons, quelle que soit notre misère présente,
c’est toujours le visage de l’ami,
de notre meilleur Ami !







Gorze, Septembre 2007


Chers Amis,


Quand nous laissons remonter à notre conscience les traces persistantes de nos vacances, nous pouvons être frappés qu’invariablement c’est la beauté, sous ses multiples formes, qui nous a le plus marqués. Elle nous poursuit et nous ne pouvons pas vivre sans elle… Mais il est non moins frappant de voir combien peu d’entre nous savent que la beauté est la transparence en tout de la présence des Anges ! La beauté manifeste sensiblement la Sagesse divine créatrice que les Anges font pénétrer en toutes choses. Si bien que toute créature a son ange : les eaux, le feu, le vent, les astres, les animaux, les végétaux, les minéraux, les hommes, les peuples, les Eglises, même les lieux, les villes, les monastères…etc. Chaque chose a son ange, tout est en et par la relation avec le monde angélique, parce que chaque chose, chaque être est sur terre l’expression de son thème céleste qu’est l’ange. Le ciel et la terre représentent comme les deux aspects de l’être de l’univers, de l’unique création, le monde d’en haut et d’en bas, le monde idéal et réel se reflètent donc l’un l’autre. Même ma voiture fonctionne seulement parce que derrière les lois de la mécanique se trouve un Ange ! …C’est une « infusion » réciproque.


Mais intéressons-nous aujourd’hui à l’Ange qui nous est le plus intime : notre Ange gardien ou notre Ange de lumière.

Beaucoup ne le connaissent pas ou vivent comme s’il n’existait pas, alors que c’est l’être le plus extraordinaire que nous puissions rencontrer. Sa rencontre quotidienne nous bouleverserait et transformerait notre vie de fond en comble !


L’Ange gardien est pré-créé en vue de la venue dans le monde de l’homme dont il aura la charge. A l’avance il aime sa ressemblance, son ami, il désire et attend sa naissance. Par lui, il acquiert son propre point d’appui dans le monde, il peut alors communier avec l’univers. Ce n’est pas une attente passive, il prépare cette venue. Il désire lui communiquer la plénitude de ses dons et s’unir à lui dans la béatitude. Dans ce sens il prie pour son ami terrestre qui naîtra un jour depuis sans doute des millions d’années… Ainsi sera-t-il présent tout au long de notre vie, au moment de notre mort et lors de notre Jugement. Au moment de notre mort nous reconnaîtrons notre Ange Gardien, il nous accompagne à travers les épreuves de notre périple et nous introduit comme pédagogue dans les mystères de l’Au-delà.


Il y a ressemblance entre la personne de l’Ange Gardien et celle de l’homme : c’est la même individualité qui vit dans deux mondes, au ciel et sur la terre. Bien sûr, l’Ange a une personne épanouie, spirituellement achevée, vivant dans la plénitude et la béatitude de la connaissance de Dieu, tandis que chez l’homme tout cela n’est qu’en germe. Entre les deux il ne s’agit pas d’identité mais de ressemblance. Tout être humain, chacun d’entre nous, a donc ses racines dans le monde d’en haut. Il y trouve sa correspondance, son ami en qui il se reflète : l’Ange Gardien est le prototype céleste de l’homme, il imprime en l’homme l’image de Dieu.


L’un n’existe pas à côté de l’autre, mais les deux sont pénétrés des mêmes rayons de la sagesse créatrice de Dieu. Tous deux sont un dans la même Sagesse divine. L’Ange Gardien n’est pas un simple serviteur, il est notre moi céleste, il est mon fondement au ciel de mon être sur la terre.


Je ne serais pas s’il n’était pas, et lui ne serait pas si je n’existais pas. Il y a complète conjonction ontologique, une unité de racine pour les deux.


L’Ange Gardien peut appartenir à n’importe quelle hiérarchie angélique. Celle-ci, aussi haute qu’elle soit, est toute entière tournée vers l’homme et à son service. Toute l’histoire de l’humanité est une incessante coopération entre les Anges et les hommes, comme en témoigne longuement toute l’Apocalypse.


Communier avec son Ange Gardien c’est, pour chaque homme, satisfaire totalement sa soif d’amour spirituel. L’Ange Gardien est l’ami de chaque homme. Il est créé pour lui et donné par Dieu pour chacun personnellement. Il est notre « moi » d’en haut. Il veille et vit toujours avec l’homme d’une vie unique. C’est l’être le plus proche de chacun de nous. Faute de ce protecteur, notre essence aurait été flétrie, empoisonnée, décomposée et détruite dans le combat spirituel contre les esprits malins. Notre Ange nous en préserve sans relâche. Là est son activité incessante, toujours intense, il y met toute sa force, mais il ne s’impose pas. Il nous insuffle dans un silence audible la connaissance qui est la sienne, les mystères divins et la guidance. Mais cela suppose le silence du mental, la non-réflexion. Il regarde dans notre âme et il nous voit : par cette présence et sa seule existence auprès de nous il nous infuse les meilleures de nos forces. Cette influence continuelle nous est imperceptible à cause de sa profondeur et de son intimité. Il ne veut surtout pas se mettre à notre place, mais nous éveiller et nous susciter intérieurement à nous-même.


C’est un travail de sourcier et d’accoucheur, ce qui devrait être le propre de tout vrai pédagogue !C’est de la part de l’Ange une création continue, un effort constant, mais jamais sans nous. Chacun de nous vit à deux. L’important est de s’ouvrir, de s’abandonner à son influence !Pour comprendre tout cela, il faut se débarrasser des interprétations simplistes : l’Ange Gardien n’est pas un instrument ou un fonctionnaire, mais son travail auprès de nous est l’expression de son être, c’est son charisme au sein de la création, une union ontologique avec nous.


L’Ange Gardien est l’ami, il aime celui qui lui est confié, c’est un amour personnel, un amour pur et absolu. Il ne détourne jamais de nous son regard plein d’affection et de tendresse, de lumière et de joie ! Son amour est puissant, il contient la condition de notre libération, mais aussi celle de sa propre vie : la force de son amour est essentielle pour lui-même. Il partage notre destinée et cherche notre sentiment en retour. Il communie à nos joies et à nos peines, il est donc aussi éprouvé à cause de nos souffrances, il s’afflige de nos péchés. Notre vie c’est la sienne sans qu’il perde la communion incessante avec l’éternité et la béatitude divine.

Comme tout amour, l’amour de l’Ange Gardien pour chacun est sacrificiel, c’est un renoncement, un abaissement de son être pour s’unir à l’être de chair, analogue à l’abaissement du Verbe. Y a-t-il un plus grand bonheur que de se sentir aimé à ce point, personnellement ?


C’est le plus merveilleux cadeau que le Seigneur fait à chacun !


Si tu débordes d’action de grâces, c’est que ton Ange est déjà là, tout près de toi, en toi…Avec toute notre affection, à bientôt !


Père Alphonse et Rachel



Prière à l’Ange gardien :

Glorieux gardien de mon âme,

Toi qui brilles dans le beau cielcomme une douce et pure flamme,

près du Trône de l’Eternel ;

Tu viens pour moi sur cette terre,

et m’éclairant de ta splendeur,

Bel Ange, tu deviens mon frère, mon ami, mon consolateur !

Connaissant ma grande faiblesse,

tu me diriges par la main ;

et je te vois, avec tendresse,

ôter la pierre du chemin.

Toujours ta douce voix m’invite à ne regarder que les cieux ;

plus tu me vois humble et petite,

et plus ton front est radieux…

A toi, le Royaume et la Gloire, les richesses du Roi des rois.

A moi, le Pain du saint ciboire, à moi, le trésor de la Croix.

Avec la Croix, avec l’Hostie, avec ton céleste secours,

j’attends en paix, de l’autre vie, le bonheur qui dure toujours !


Sainte Thérèse de Lisieux




01 juillet 2007

Devenir adulte


"J'ai souvent pensé qu'on ne devient réellement adulte qu'au moment où l'on pardonne à ses parents d'être aussi imparfaits que le reste des humains et où l'on reconnaît que, avec leurs limites, ils ont fait de leur mieux pour vous. Mais enfin, aimer ses géniteurs ne signifie pas que l'on reprenne à son compte leur conception de la vie.

"La poursuite du bonheur" Douglas Kennedy

30 avril 2007

Me nettoyer l'âme au Karcher


J'ai couru vers la mer, pour être au plus près de ce qui m'attendait le lendemain. En bas, entre deux rochers, une plate-forme de pierre, avec une digue et une vieille barque attachée à un treuil rouillé et rongé par le sel. Et en face, le fameux îlot, ramassé sur lui­même comme une carapace de tortue surgissant de la mer qui clapotait furieusement devant mes pieds.


Le silence était parfait. Rien d'autre que le bruit des vagues. Rien d'humain. Je comprenais Octave d'un seul coup. C'est peut-être cela que j'étais venu chercher. Me laver le corps dans un silence parfait. Me nettoyer l'âme au Karcher. Jeter par-dessus bord tout ce qui encombrait et qu'on nous foute une paix royale. Dispa­raître enfin. Me mettre en stand-by pour des siècles. Un endroit où l'essentiel serait à portée de regard.


Ne plus penser au boulot, à l'ambition, à baiser des nanas et à pleurer le matin sur l'oreiller pour le temps et l'amour à jamais perdus. Casser tout rêve en le dénonçant immé­diatement comme une chimère. Ne pas vouloir être une star de la télé et refuser la fausse bataille qu'on nous imposait. Ne plus avoir comme unique alternative la cocaïne ou les cocktails vodka-tonic pour supporter la vie et tenir. Ne plus courir après les prétendus hon­neurs, être reconnu par cent personnes, être invité dans «les fêtes qui comptent". Ne plus se laisser emmerder par tous les cons qui voulaient notre place, si petite fût­ elle, envoyer se faire foutre tous ceux qui voulaient nous la mettre en douceur.


En finir avec le monde d'une tout autre façon que la mort : ramasser son être entier en une seule boule chaude sous les côtes, et entrer dès maintenant au paradis.


Je le détestais moins soudainement. Il pouvait être fier de ce qu'il avait fait. Il avait dit merde au monde qui n'était plus un monde mais un enfer. Il avait fait un gigantesque bras d'honneur aux faux plaisirs. Il les avait niqués sur toute la ligne. On verrait demain. J'étais peut-être venu là pour prendre une bonne leçon.



Interdit à toute femme et à toute femelle.

Christophe ONO-DIT-BIOT

07 avril 2007

Traversée du désert

Toi notre Père et Père de toute l’humanité,
Distinct de tout être créé,
Que tu sois pour moi au-dessus de tout.
Que ton royaume s'établisse dans ma propre conscience.
Que je me conforme avec soumission à ta volonté divine.
Au quotidien et ici-bas ou tu t'es manifesté
A l'imitation de tous les saints qui nous ont montré le chemin
Jour après jour, veille à mes justes besoins matériels
Fais-moi vivre de ta Parole
Apprends moi à recevoir le Pain Vivant
Et si je m'en suis rendu digne
Pardonne mes désobéissances à ta volonté
Ne soumets pas mes faiblesses à de trop grandes tentations
Et fasse que j'accepte avec humilité tes épreuves purificatrices.

22 mars 2007

Qui suis-je ?

"Si tu devais me décrire en un seul mot, lequel choisirais-tu ?" lui dit-il

Il lui répondit :

"D'emblée sans chercher, j'avais un mot en tête mais je me suis rendu compte qu'il n'existait pas; alors je l'ai inventé : "Cerisiesque"! Cela signifie tout à la fois :

- fort et faible ;
- solide et fragile ;
- qui touche l'amour du doigt, ne se sent pas aimé et refuse l'Amour ;
- époux et amant ;
- "animus" et "anima" (cf Jung !) ;
- "eros" et (pas tout à fait encore ; mais ça vient) "agapé";
- mûr et immature ;
- sûr et pas sûr de lui ;
- un colonel avec des côtés "racaille" (!) ;
- conventionnel et non-conventionnel ;
- homme et enfant ;
- froid et ardent (j'ai pas dit "chaud" !) ;
- un "pas sage du tout" qui a beaucoup de sagesse ;
- surprenant et déconcertant ;
- hyperactif et contemplatif ;
- égoïste et généreux ;
- un être de mensonges mais pétri et épris de vérité ;
- un nomade sédentaire ;
- père et fils ;
- mais aussi ... un fils de ses enfants et un père de son père ;
- au coeur de pierre...mais de pierre tendre ;
- simple et compliqué ,
- entier et écartelé ;
- souillé mais pur ;
- motard et automobiliste ;
- aviateur et navigateur ;
- un montagnard au pied marin ;
- un citadin qui aime la campagne ;
- fermé et ouvert ;
- borné et docile ;
- juif et orthodoxe (mais pas juif-orthodoxe !)
- drôle et triste ;
- timide et sociable ;
- dur et souple ;
- inconscient mais lucide

etc etc etc... En bref : "touchant. "

18 mars 2007

De la mort ...



« Souviens-toi qu’au moment de ta naissance tout le monde était dans la joie et toi dans les pleurs. Vis de manière qu’au moment de ta mort tout le monde soit dans les pleurs et toi dans la joie. »Proverbe arabe

« Rien ne s’arrange mais tout se tasse. »Marcel Achard
« Nous faisons partie de la terre, et elle fait partie de nous. »Chef Seattle

« Le jour de votre naissance, vous avez commencé à mourir : ne perdez plus un seul instant ! »Dilgo Khyentsé Rinpotché

« Mieux vaut ne pas avoir peur de la mort que de mourir de peur. »Shimon Pérès

28 février 2007

La fleur de la liberté


"St Nectaire considérait que le principe de la douleur, c'est d'apprendre à l'homme à vivre libre.

Sans aucun doute, une grande partie des souffrances et des peines provient aussi de la volonté propre, des erreurs, des coïncidences inévitables ou de la loi des causes et des effets, car tout Homme doit devenir digne de la liberté, le don le plus grand de son Créateur.



Le Seigneur verse son sang sur la Croix pour libérer sa créature de la loi de la corruption, pour lui donner la possibilité de se diriger librement sur le chemin du Royaume : l'esprit de celui qui adore Dieu est saisi de vertige devant la grandeur du don qu'Il a fait au chef-d'œuvre de sa création... mais les hommes se traînent à terre et recherchent tous les moyens d'abolir la liberté, de la couler dans des moules, de lui faire perdre sa qualité propre et d'en fabriquer une idole.

Le désir éternel du Père céleste, c'est que l'homme qu'Il a créé cultive la merveilleuse fleur de la liberté dans le jardin de son cœur qu'il avance vers la maturité en fréquentant sans cesse ce grand maître et compagnon, la douleur, en apprenant à connaître par expérience les épines et l'ivraie."


Saint Nectaire d'Egine 1846-1920 de Sotos Chondropoulos
cahiers du prieuré Saint michel de l'Eglise catholique orthodoxe de France
Edition spéciale N°50 p152


Mais :

La douleur si elle est assumée libère, pacifie, illumine, revivifie et en fin de compte disparait puisqu'elle a laissé la place entière à ce qui vient d'en-haut !


et sinon il y a toujours l'humour :

L'expérience ne se transmet pas , seul le patrimoine se transmet !
C'est mon notaire qui me l'a dit !






21 janvier 2007

A tous les pots félês...

LE POT FÊLÉ


Une vieille dame chinoise possédait deux grands pots, chacun suspendu au bout d'une perche qu'elle transportait, appuyée derrière son cou.

Un des pots était fêlé, alors que l'autre pot était en parfait état et rapportait toujours sa pleine ration d'eau.
À la fin de la longue marche du ruisseau vers la maison, le pot fêlé lui n'était plus qu'à moitié rempli d'eau.


Tout ceci se déroula quotidiennement pendant deux années complètes, alors que la vieille dame ne rapportait chez elle qu'un pot et demi d'eau. Bien sûr, le pot intact était très fier de ses accomplissements.

Mais le pauvre pot fêlé lui avait honte de ses propres imperfections, et se sentait triste, car il ne pouvait faire que la moitié du travail pour lequel il avait été créé.

Après deux années de ce qu'il percevait comme un échec, il s'adressa un jour à la vieille dame, alors qu'ils étaient près du ruisseau. « J'ai honte de moi-même, parce que la fêlure sur mon côté laisse l'eau s'échapper tout le long du chemin lors du retour vers la maison. »

La vieille dame sourit : « As-tu remarqué qu'il y a des fleurs sur ton côté du chemin, et qu'il n'y en a pas de l'autre côté ? J'ai toujours su à propos de ta fêlure, donc j'ai semé des graines de fleurs de ton côté du chemin, et chaque jour, lors du retour à la maison, tu les arrosais.

Pendant deux ans, j'ai pu ainsi cueillir de superbes fleurs pour décorer la table. Sans toi, étant simplement tel que tu es, il n'aurait pu y avoir cette beauté pour agrémenter la nature et la maison. »


07 janvier 2007

La Musique de la Bible


La Bible hébraïque (la Thora) est dans son entier une immense partition chantée ; les signes musicaux sont effec­tivement notés de part et d'autre du texte hébreu, mais ces signes nous
étaient devenus aussi hermétiques que les hiéroglyphes égyptiens avant les travaux de Champollion.

Délaissant les interprétations empiriques qui étaient pratiquées jusqu'à présent (et depuis plusieurs siècles) dans les synagogues, Suzanne Halk Vantoura s'est penchée sur les signes bibliques et sur eux seuls.
A force d'hypothèses, de déductions, d'expérimentations, elle réussit à retrouver la clé de cette notation de tradition antique; elle réussit donc à retrouver la signification musicale de ces signes, et put enfin faire revivre et transcrire en notation moderne la musique qui se dévoilait à elle après le défri­chage méthodique et les vérifications les plus irréfutables, alors que les cantillations dans les synagogues, différant (pour un même texte) d'un pays à l'autre, ne pouvaient se récla­mer d'aucune justification logique.
En plus de la méthode rigoureuse qui devait présider à une telle entreprise, ce décryptage exigeait la sensibilité d'un musicien (S. Haik Vantoura est en effet un compositeur) pour retrouver les normes d'une musique perdue et pour contrôler sans cesse le bien-fondé de l'expression musicale renfermée dans cette antique partition.

Le résultat de ces années de travaux est une somme historique qui a convaincu les musicologues comme les hébraïsants, et la révélation de trésors musicaux qui ont déjà subjugué les plus grands compositeurs. Le fruit des travaux que nous venons de résumer en quelques lignes a fait l'objet d'un livre extrêmement dense où Suzanne Haik Vantoura a veillé à ne laisser aucun point (historique, technique, musical) dans l'ombre.

La musique était-elle étroitement liée à la célébration, à la diffusion du culte israélite ?
Nous devons même répondre qu'elle tenait une place à peine concevable : sous le règne de David (donc avant la construction du Temple), les psaumes étaient chantés par 288 chanteurs (également instrumentistes, jouant des harpes, lyres, cymbales), soutenus dans certains textes par 120 trompettes, tandis que 24 chefs de chant enseignaient sans relâche la musique aux quelque 4000 aspirants-chantres... Malheureusement cette splendeur alla déclinant e~ au début de notre ère, la dispersion acheva de briser un tel édifice musi­cal consacré au service de la religion.

Or, seule la partie chantée nous est donnée dans la Bible ; pourtant nous savons indubi­tablement que les psaumes étaient accompagnés, et par quels instruments ils l'étaient.
Pour pouvoir suggérer au public la complète substance sonore de cette musique, Suzanne Haik Vantoura a réalisé un discret accompagnement, soucieuse de ne jamais empiéter sur la ligne chantée, enregistrée dans sa plus pure authenticité. Mais il fallait absolument évi­ter que le public croit avoir affaire (pour les psaumes) à une musique monodique.

En écoutant cette musique, chacun aura conscience, une fois de plus, que l'histoire du peuple d'Israël est le berceau de notre histoire occidentale... et de son langage musical. Ces musiciens antiques, traversant diverses contrées, s'imprégnèrent des modes de ces pays, mais l'assimilation personnelle qu'ils en retinrent s'éloigne des musiques du Moyen­Orient pour ouvrir singulièrement (nous devons en convenir) sur des éléments constitu­tifs de notre future musique européenne. De ce fait, ces chants issus du fond des âges nous paraissent curieusement actuels et nous parlent beaucoup plus directement que des documents archéologiques. Prodigieusement actuelle, de même, la solution apportée par les musiciens bibliques au problème du lien texte-musique. En effet, on constatera tout d'abord la corrélation expressive entre les textes et leur ligne mélodique, puis l'économie de moyens dans cette expression, économie qui permet tout à coup de souligner une phrase par un intervalle plus poignant, par une ligne merveilleusement souple, etc. Laissons à l'auditeur le soin de découvrir la variété de sentiments obtenus grâce à cette justesse de touche. Alors on comprend vraiment que la musique ait été ressentie comme un moyen de faire pénétrer le message biblique plus avant dans le cœur de chacun.

Cette manière de souligner les intentions du texte confirme encore la filiation jusqu'à la musique européenne, car dans certains chants il nous semble reconnaître les nuances poétiques (les "madrigalismes") des compositeurs du XVI' siècle. Mais des musiciens bibliques aux madrigalistes, il y a de nombreux paliers intermédiaires, notamment le chant grégorien dont on redécouvre actuellement les sources orientales.

Dans cette somme de richesses nouvellement découvertes, il fallut choisir quelques chants pour constituer ce disque; il fut donc décidé d'enregistrer des textes bibliques de caractère particulièrement diversifié, et concernant chacun de nous au plus profond de notre être par les exhortations, les prières, l'évocation des sentiments éternels qu'ils contiennent.

SYLVIANE FALCINELLI

Célibat



Père et Mère du Monastère de St Silouane







" Il m'arrive de dire en plaisantant que le choix du célibat pour le Royaume et le choix du mariage chrétien sont en fin de compte très proches, car si le célibataire choisit de renoncer à toutes les femmes, celui qui se marie renonce à toutes les femmes moins une ; ce qui, vu le nombre, ne fait pas une différence énorme !"

Jacques Philippe de la communauté des Béatitudes

03 décembre 2006

Pourquoi ?

Pourquoi dans la religion chrétienne jeûne-t-on le mercredi et le vendredi ?

Le jeûne est une institution juive que l'on retrouve également dans d'autres religions.
Hors le chrétien n'est plus soumis à la Loi juive. L'auteur de la Didachè (Texte du Ier siècle également intitulé Doctrine des douze apôtres), qui voit bien que le jeûne a une valeur religieuse même sous la Loi nouvelle, propose donc de garder le jeûne en modifiant les jours :

"VIII, 1 Que vos jeûnes n'aient pas lieu en même temps que ceux des hypocrites (Mt. 6,16). Ils jeûnent en effet le lundi et le jeudi ; pour vous, jeûnez le mercredi et le vendredi." (Les Pères Apostoliques, Sagesse Chrétienne, Les éditions de Cerf 2006, p53).

Le jeûne total. Le jeûne total jusqu’à la tombée de la nuit est également une très ancienne tradition chrétienne d’origine juive, gardée jusqu’à nos jours, notamment le mercredi (mémoire de la trahison de Judas) et le vendredi (mémoire de la mort du Christ sur la Croix).


Pourquoi dit-on que le Christ est de la lignée de David alors que Joseph n'est que son père adoptif ?

Certains évoqueront la lignée de Marie... je préfère quand à moi cette explication trouvée dans Le livre des merveilles chez Mame /Plon p26 :

"Joseph, fils de David, ne crains pas de recevoir chez toi ton épouse Marie, car l'enfant qui a été engendré en elle vient de l'Esprit Saint. Au fils qu'elle enfantera, tu donneras le nom de Jésus" Appelé à nommer l'enfant, Joseph sut qu'il en était indiscutablement le père ; non un père adoptif, mais un père adopté par son enfant dès sa conception dans le sein de son épouse."

20 novembre 2006

Une main qui donne



"L'art est comme une prière,
une main tendue dans l'obscurité
qui veut saisir une part de grâce,
pour se muer en une main qui donne"

Kafka

15 octobre 2006

A tout je dis : oui !

L’attitude fondamentale du disciple est celle du Maître, elle tient en un mot : oui.

Mais « Oui » à ce qui est, c’est-à-dire la vigilance.
Tout ce qui est en moi et en dehors de moi, ici et maintenant, c’est Dieu qui frappe à ma porte.
Si je dis : « Oui », autrement dit si je suis en accord, en communion avec ce qui m’arrive, alors c’est toujours Dieu qui entre et se manifeste en moi (Ap 3, 20).

Nous sommes constamment dispersés, ailleurs, emportés, contrariés ou agressifs, parce que, plus ou moins consciemment, nous refusons la réalité, nous ne voyons que la réalité extérieure, la surface des événements, parce qu’elle nous déplaît et nous fait souffrir. Mais si nous sommes en accord uniquement avec ce qui est agréable, alors nous faisons un tri dans la vie et nous ne la rencontrons jamais dans sa profondeur.

Il est impossible de communier à l’éternité sans communier au temps qui la contient. On ne peut descendre dans la profondeur mystérieuse de l’océan sans traverser les vagues qui l’agitent à la surface. Le chemin spirituel est un état de communion, instant après instant, une adhésion inconditionnelle à ce qui est, au-dedans et en dehors.

C’est l’exigence la plus extraordinaire du Christ : l’amour des ennemis. Donc communier, devenir un avec la totalité de la vie, y compris avec ce qui nous est difficile, contraire et hostile. Le Christ a montré que l’on peut aimer même ce qui est le plus abject : la souffrance et la mort. Cela ne veut en aucun cas signifier que l’on approuve la souffrance et la mort, mais l’on se laisse aimer par Dieu à travers elles. Celui qui exerce la vigilance jusque-là découvre peu à peu un tout autre plan de conscience, tout change radicalement, il se sent guidé de l’intérieur, pas à pas, et la vie se manifeste à lui en plénitude, dans une paix et une joie indescriptibles. Son expérience sera celle de saint Paul et de tous les saints : Ce n’est plus moi qui vis, mais c’est le Christ qui vit en moi (Ga 2,20).

Cette traversée inconditionnelle de toutes les conditions que présente la vie au jour le jour, minute après minute, conduit à l’état non conditionné où nous sommes déjà des ressuscités.
Cela dépend évidemment de ma décision. Seule ma conviction de foi que Dieu est vivant à l’intérieur de tout et qu’Il vient à ma rencontre, même dans la pire des situations, me permet de l’embrasser avec amour et de communier à ce qui m’arrive. On ne s’imagine pas le Christ prendre « sa » croix à contrecoeur ou à reculons, en regimbant contre elle… Non ! Il s’étend librement dessus, Il accorde tout son être à elle. Il n’y a pas d’autre manière de prendre « notre » croix à chaque instant. Appréhendée de l’extérieur, la croix du Christ était une horreur aux yeux de tous, mais pour Lui elle était l’accomplissement de la volonté de son Père. Et cet accord total fait jaillir la Résurrection. Là est aussi notre « Chemin », qui est le Christ Lui-même (Jn 14,6). Tous les saints l’ont emprunté exclusivement. L’un d’eux, cité par saint Césaire, dit qu’il fondait tellement sa volonté dans celle de Dieu qu’il ne faisait rien sans son mouvement, ni dans les grandes ni dans les petites choses : J’accepte tout indifféremment de la main de Dieu, sans rien examiner, dit-il.

Celui qui pratique cette soumission acquiert, à chaque instant, des trésors inestimables et en peu de jours, il amasse plus de richesses que d’autres en plusieurs années et par beaucoup de travail (…) Non seulement cette conformité de notre volonté avec celle de Dieu nous sanctifie, mais encore elle nous rend heureux(…) et elle fait de la terre un paradis anticipé, elle est l’acte le plus parfait de la charité. (J-B Saint-Jure)

C’est une manière révolutionnaire de penser et de vivre que le Christ a introduite au sein de l’humanité comme Chemin vers le bonheur. Alors seulement, sur les bases de cette union à Dieu dans l’instant présent, l’homme peut agir. Il ne sera plus dans la réaction selon les caprices de son « moi », mais dans l’agir divin, selon la volonté de Dieu. Tous ceux qui ont cette pratique, ont ensemencé l’Histoire en profondeur et ne cessent de l’illuminer de l’intérieur, même des siècles après leur mort. Un acte de vigilance totale met en mouvement toute la création !

Le « Fiat » de Marie engendre le commencement absolu au sein des temps…Laissons Marie prononcer son propre « oui » en nous. Elle l’exerce en rendant grâces sans cesse : Mon âme magnifie le Seigneur et mon esprit est ravi de joie en Dieu mon Sauveur ! C’est un fabuleux lâcher-prise au coeur de la vie. Je commence à l’instant même : je détends mes épaules complètement, je respire par le ventre et me centre dans le bassin, je suis conscient de mon corps que j’habite et je m’abandonne tout entier à Dieu. Je suis libre de tout souci, Dieu est Dieu, Il prend mes affaires en Ses mains… Je saute aujourd’hui hors de ma vieille vie !

Père Alphonse et Rachel


Prière :

Donnez-moi la mort, donnez-moi la vie :
Donnez-moi santé ou maladie,
Honneur ou déshonneur donnez-moi.
Donnez-moi la guerre, ou une paix accrue,
La faiblesse ou la force accomplie,
Puisque à tout je dis oui.
Donnez-moi richesse ou pauvreté,
Donnez-moi consolation ou désolation,
Donnez-moi allégresse ou tristesse,
Donnez-moi l’enfer, ou donnez-moi le ciel…
Puisque je me suis rendue à merci…
Qu’ordonnez-Vous qu’il soit fait de moi ?


Sainte Thérèse d’Avila (XVI°siècle)


Texte à méditer :

" Le grand et solide fondement de la vie spirituelle est de se donner à Dieu pour être le sujet de son bon plaisir pour tout, à l’intérieur et à l’extérieur, et de s’oublier si bien ensuite qu’on se regarde comme une choses livrée et vendue, à laquelle on n’a plus aucun droit, de sorte que tout est pour le bon plaisir de Dieu, de façon qu’il fasse toute notre joie et que son bonheur et sa gloire, son être fassent notre unique bien. Ce fondement posé, l’âme n’a qu’à passer toute sa vie à se réjouir de ce que Dieu est Dieu, laissant son propre être tellement à son bon plaisir que le contentement soit égal de faire ceci ou cela ou le contraire, selon que son bon plaisir en disposera, ne faisant aucune réflexion sur l’usage que ce bon plaisir en fait. »

(Jean-Pierre de Caussade, 1861)

03 septembre 2006

Rendez-vous


"Une vie entière faite de souffrances, de courage, de labeur inlassable et de peines. Et pourtant, le sourire, la lumière et la foi, toujours, jusqu'à la fin..."
Pour cela ...

Suivre le conseil éclairé du Renard : se préparer, à trois heures moins le quart, au plus hasardeux des rendez-vous. Y faire la plus inattendue, la plus émouvante et la plus magique des rencontres. Y faire, même, la rencontre de toutes nos vies : la rencontre avec nous-mêmes...

02 septembre 2006

Vision biblique de la beauté

« Il y eut un soir et il y eut un matin, ce fut le jour. »



L'art de l'icône de Paul Evdokimov (Chapitre premier).


« Le beau est la splendeur du vrai » disait Platon : affirmation que le génie de la langue grecque a complétée en forgeant un terme unique, kalokagathia, qui fait du bon et du beau les deux versants d'un seul sommet. Au degré ultime de la synthèse, celle de la Bible, le vrai et le bon s'offrent à la contemplation, leur vivante symbiose marque l'intégrité de l'être et fait jaillir la beauté.
«L'oiseau sur la branche, le lis dans les champs, le cerf dans la forêt, le poisson dans la mer," les troupes innombrables d'hommes joyeux proclament avec allégresse : Dieu est amour ! Mais au-des­sous, et comme portant toutes ces voix, comme la basse mugissante sous tous ces clairs sopranos, on entend, de profundis, la voix des sacrifiés : Dieu est amour1! »
Les sacrifiés, les martyrs, ces « amis blessés de l'Époux » qui « se donnent en spectacle aux anges et aux hommes », représentent les accords fondamentaux de l'immense chant du salut. Les épis mois­sonnés, le Seigneur les range dans les greniers de son Royaume. La Tradition y voit la conformation au Christ dans la Beauté ; Nicolas Cabasilas, le grand liturgiste du XIVe siècle, le dit en parlant de « ceux qui surent aimer par-dessus tout la Souveraine Beauté2 », semence du divin, « agapè enracinée dans le cœur3 ».
En tirant le monde du néant, le Créateur, en Poète divin, compose sa « Symphonie en six jours », l' Hexaméron, et, à chacun de ses actes, il « vit que c'était beau ». Le texte grec du récit biblique dit xocÀ6v-­beau et non ocyoc66v-bon, le mot hébreu signifie les deux à la fois. D'autre part, le verbe créer est conjugué en hébreu selon le mode accompli : le monde a été créé, il est créé et il sera créé jusqu'à son accomplissement. En sortant des mains de Dieu, le germe est déjà beau, mais il appelle son évolution, l'Histoire combien mouve­mentée et tragique du synergisme de l'agir divin et de l'agir humain. Selon saint Maxime le Confesseur, l'achèvement de la première beauté dans la Beauté parfaite se pose au terme et reçoit le nom du Royaume 4.

La Tradition apporte ici une précision importante. Un grand spirituel du IVe siècle, Évagre, en commentant la variante du Pater dans l'Évangile de saint Luc où à la place du « Règne » on lit « que Ton Esprit Saint vienne », dit: « Le Règne de Dieu, c'est l'Esprit Saint, nous prions le Père qu'il le fasse descendre sur nous5 »; en accord avec la Tradition, Évagre identifie ainsi le Royaume et l'Esprit Saint.
Si donc le Royaume contemplé est la Beauté, la Troisième Personne de la Trinité se révèle Esprit de la Beauté. Dostoïevsky l'a bien com­pris: « L'Esprit Saint, dit-il, est la saisie directe de la Beauté », il communique la splendeur de la Sainteté. C'est pourquoi, selon saint Grégoire Palamas, au sein de la Trinité, l'Esprit est « la joie éter­nelle... où les Trois se complaisent ensemble6. » La célèbre icône de la Trinité de Roublev nous offre la vision saisissante de cette Beauté divine.
Le dogme trinitaire explicite : si le Fils est la Parole que le Père prononce et qui se fait chair, l'Esprit la manifeste, la rend audible et nous la fait entendre dans l'Évangile, mais lui-même reste caché mystérieux, silencieux, « il ne parlera pas de lui-même » (Jn 16, 13). Sa personne se dissimule dans son épiphanie même : « Ton Nom tant désiré, et constamment proclamé, nul ne saurait dire ce qu'il est 7. »
Son œuvre propre en tant qu'Esprit de la Beauté est une « poésie sans parole ». Par rapport au Verbe, l'Évangile de l'Esprit Saint est visuel, contemplatif. Dans ses révélations, il est le « doigt de Dieu » qui trace l'Icône de l'Être avec de la Lumière incréée. Au seuil de l'indicible Sagesse de Dieu, il fait contempler la Beauté sophianique du Sens et le construit en Temple cosmique de la Gloire.
« Ce que la parole dit, l'image nous le montre silencieusement », « ce que nous avons entendu dire, nous l'avons vu », disent les Pères du Septième Concile au sujet de l'icône. Or, si « Personne ne peut dire : Jésus est le Seigneur! si ce n'est par le Saint-Esprit 8 », personne ne peut représenter l'image du Seigneur, si ce n'est par l'Esprit Saint. Il est l'Iconographe divin. Le rituel de la consécration d'une église insiste sur cet attribut de l'Esprit. Le tropaire (du 4e ton) chante la perfection de la forme adéquate à l'avènement du Beau : « Comme tu as déployé en haut la splendeur du firmament, de même ici-bas tu as révélé la beauté de la sainte demeure de ta gloire ». Suit l'épic1èse: « ...par ton indicible amour des hommes... la création a reçu en tant qu'image de la nouvelle alliance la théophanie du Mont Sinaï, le prodige du buisson ardent et le temple du grand Salomon ; nous te prions et nous te supplions... envoie sur nous et sur tout ton héri­tage ton très Saint-Esprit... » - « Seigneur, j'aime la beauté de ta maison » (Ps. 25).


Les attributs bien connus de l'Esprit sont la Vie et la Lumière. La lumière, avant tout, est puissance de révélation et c'est pourquoi le Deus revelatus se nomme Dieu-Lumière. Sa puissance « illumine tout homme venant dans le monde» (Jn 1,9) et selon saint Syméon « transforme en lumière ceux qu'elle illumine ». Bien plus, elle se pose en source de toute connaissance: « A Ta lumière, nous con­naîtrons toute lumière » (Ps. 36, 109).

Il y a des « points de vue » toujours partiels, donc déformants, et il y a le regard plein, faisant de l'homme, selon l'expression de saint Macaire10, un « œil unique» et immense pénétré par la lumière divine. Saint Grégoire de Nysse incite à « regarder par l'œil de la Colombe », et saint Maxime le Confesseur « avec l'œil de Dieu »: « De même qu'au centre du cercle il y a ce point unique, où sont encore indivises toutes les droites qui en partent, de même en Dieu celui qui a été jugé digne d'y parvenir, connaît d'une science simple et sans concepts toutes les idées des choses créées 11. » « Sans concepts ) signifie la saisie intuitive et contemplative et c'est pourquoi les iconographes enseignent le « jeûne des yeux 12 qui réapprend à contempler.

Déjà sur le plan optique, l'œil ne perçoit point les objets mais la lumière réfléchie par les objets. L'objet n'est visible que parce que la lumière le rend lumineux. Ce que l'on voit, c'est la lumière qui s'unit à l'objet, l'épouse en quelque sorte et prend sa forme, le figure et le révèle. L'interaction mystérieuse du charbon et de la lumière produit le diamant, la beauté. Selon une vieille croyance populaire, l'éclair pénétrant la nuit d'une huître engendre la perle 13. L'espace n'a d'existence que par la lumière qui en fait la matrice de toute vie. C'est dans ce sens que la vie et la lumière s'identifient. La lumière rend tout être vivant en en faisant celui qui est présent, celui qui voit l'autre et qui est vu par l'autre, celui qui vit avec et « vers l'autre », existant l'un dans l'autre. Par contre, l'enfer, l'Hadès grec ou le Shéol hébreu : signifie ce lieu enténébré où la solitude réduit l'être à l'extrême indigence du solipsisme démoniaque où aucun regard ne croise un autre. Les Apophtegmes coptes de Macaire l'Ancien donnent de cette solitude une saisissante description. C'est par leurs dos que les captifs sont liés les uns aux autres, et seule une grande pitié des vivants leur apporte un instant de repos: « Le temps d'un clin d'œil, nous voyons les visages les uns des autres... »

Selon le récit biblique de la création du monde, au commencement : « Il y eut un soir et il y eut un matin, ce fut le jour. » L' Hexaméron ne connaît pas la nuit. Les ténèbres et la nuit ne sont pas créées par Dieu ; pour le moment la nuit n'est qu'un signe de l'inexistant, le néant abstrait « séparé » de l'être de par sa nature. Le matin et le soir marquent la succession des événements, désignent la progression créatrice et ne forment que le jour, dimension de la lumière pure. Son contraire, la nuit, n'est pas encore la puissance effective des ténèbres ; la nuit dans le sens johannique n'apparaît que dans la chute.
Elle n'est pas une simple et passive absence de la lumière. Les psychiatres savent que toute « passivité » apparente cache une sourde et active résistance. La ténèbre dont il s'agit est une fuite désespérée à l'intérieur d'elle-même, car impuissante à se soustraire à la Lumière, et qui, pour se cacher, se couvre d'obscurité coupable, manifeste une attitude démoniaque et consciente de négation et de refus.
Lors du Repas du Seigneur, la chambre haute est tout inondée de lumière car le Christ est au milieu des apôtres. C'est à ce moment que Satan entre en Judas et dès lors Judas ne peut plus demeurer dans le cercle de lumière: il sort précipitamment, et Jean, si sobre pour les détails, remarque: il faisait nuit. Les ténèbres de la nuit enveloppent Judas et dissimulent le terrible secret de sa communion avec Satan.

Le premier jour de la Création, notent les Pères, n'est pas prôti mais mia, il n'est pas le premier mais l'un, l'unique, hors série. Il est l'alpha qui porte déjà et appelle son oméga, le huitième jour de l'ac­cord final, le Plérôme.
Ce premier jour est le chant joyeux du Cantique des Cantiques de Dieu lui-même, le jaillissement fulgurant du « que la Lumière soit ! ». Cette lumière n'est point un élément optique, celui-ci appa­raîtra le quatrième jour avec le soleil astronomique. La Lumière initiale, « au commencement » dans le sens absolu, in principio, est la révélation la plus bouleversante de la Face de Dieu. « Que la Lumière soit » signifie pour le monde en puissance : que la Révélation soit et donc que le Révélateur, que l'Esprit Saint vienne! Le Père prononce sa parole et l'Esprit la manifeste, il est la Lumière de la Parole. Elle révèle Dieu comme le Toi absolu et suscite immédia­tement celui qui l'écoute et le contemple, la seconde lumière surgie de la Lumière et posée comme son autre moi et miroir dans la lumière-révélation-communion.


Même après la chute, « la lumière luit dans les ténèbres ». Elle ne luit pas pour luire seulement, elle métamorphose la nuit en jour sans déclin: « Ta lumière se lèvera au sein de l'obscurité et la nuit se changera en clarté de midi » (Is. 58, 10). « L'œil est la lampe du corps: si ton œil est sain tout ton corps sera dans la lumière ) (Mt. 6, 22). La tradition hésychaste enseigne la méthode du recueillement silencieux et la science de la lumière: « Les parfaits s'instruisent dans le divin non pas seulement par la parole (le Verbe), mais par la lumière de la parole (l'Esprit Saint), mystérieusement... »
Au sommet de la sainteté, l'être humain « devient en quelque sorte lumière 14 ». Ainsi un Séraphin de Sarov s'habille de soleil et rayonne; appelé « très ressemblant ), il est l'icône vivante du Dieu-Lumière. Saint Grégoire de Nysse décrit ta montée de l'âme qui entend: « Tu es devenue belle en t'approchant de Ma lumière. »
L'homme est aspiré vers le haut, « tombe en haut » pourrait-on dire, et atteint le niveau de la beauté divine. Être dans la lumière, c'est être dans une communion éclairante qui révèle les icônes des êtres et des choses, saisit leurs logoï contenus dans la pensée divine et initie ainsi à leur intégrité parfaite, autrement dit, à leur beauté voulue par Dieu.

L'Apocalypse est au terme, il est aussi au commencement. La lumière du premier jour est l'objet de la vision, elle est aussi l'organe de la vision. Tout comme ce temps premier de la Création, « le siècle futur forme tout entier un seul jour, le grand Jour », dit saint Grégoire de Nysse. En effet, selon l'Apocalypse: « La nuit ne sera pas, et les hommes n'auront besoin ni de la lumière d'une lampe, ni de la lumière du soleil parce que le Seigneur Dieu les éclairera » (22, 5).
« Je suis l'alpha et l'oméga... le commencement et la fin. » Le cercle de la Révélation est bouclé sur la différenciation et en même temps l'identité parfaite de tous ses éléments. La première parole de la Bible « Que la Lumière soit » en est aussi la dernière: « Que la Beauté soit! » L'homme ne peut que devenir tout entier vivante doxologie: « Gloire à Toi qui nous a révélé la Lumière. ) - « Une chose qu'à Yahvé je demande, la chose que je cherche, c'est d'habiter la maison de Yahvé tous les jours de ma vie, de contempler la Beauté de Yahvé »(Ps. 27, 4). Saint Basile ajoute: « Les saints priaient pour que la contemplation de la Beauté divine s'étende sur l'éternité... »



1. KIERKEGAARD, La note de 1852, Bohlin, 1941, p. 2SI.
2. M. LOT BORODINE, N. Cabasilas, 19S8,p.IS6.
3. SAINT JEAN CHRYSOSTOME, lbid., p. ISS.
4. Myst. 23; P.G. 91, 701 C.
5. Le Traité de l'Oraison, I. Hausherr, Paris, 1960, p. 83.
6. Cap. phys., 37.
7. Saint SYMÉON le Nouveau Théologien; Hymne à r amour divin, in (. La vie spirituelle 1), 27, 1931, p. 201.
8. 1 Cor. 12, 3.
9. La rédaction des Évangiles et l'icône se placent après l'illumination de la Pentecôte.
10. Hom. 1,2
11. JEAN HANI, Le Symbolisme du Temple chrétien, Paris, 1962, p. 126.
12. SAINT DOROTHÉE, Enseignements utiles à l’âme.
13. Pour saint Éphrem le Syrien, la perle évoque le baptême d'eau et le feu car elle est fruit de l'union de l'eau et du feu-lumière. Saint Macaire parle de la «Perle céleste 0, image de la Lumière divine, et dans la parabole évangélique elle figure le Royaume.
14. G. PALAMAS, Homélies sur la présentation de la Sainte Vierge au temple

31 juillet 2006

Souffrance sans Limites


"Véritablement, il portait nos maladies.
C'était de nos douleurs qu'il s'était chargé, et nous,
nous le considérions comme un chatié,
que Dieu avait frappé et qu'il humiliait.
Mais lui, il fut perçé à cause de nos fautes,
il a été broyé par nos iniquités.
Le châtiment par quoi la paix nous fut donnée, il l'a subi ;
ses plaies sont notre guérison"
(Is 53)






La souffrance du Christ sans Limites n'est pas un attribut métaphysique, une expérience psychologique, un impératif moral. Il ne saurait être un sentiment humain et subjectif que l'on veut déifier.

Pour l'approcher, il faut élargir notre vision aux dimensions de la Souffrance universelle.
C’est du dedans que Dieu connaît la peine des hommes.
« N’attristez pas le Saint-Esprit » nous dit Saint Paul (Ep 4,30). Dans notre monde pécheur, chaque fois que nous couvrons la voix de la Colombe et que nous nous fermons au murmure de ses suggestions, nous « Eteignons l’Esprit » (I Th 5,19). Nous éteignons le Don du père à son Fils, nous nous fermons au Logos, nous éteignons le Don par excellence, l’extraversion et l’abnégation sans Limites, nous nous coupons du mérite parfait et incontestable.

La souffrance sans Limites, la "souffrance de Dieu", est un acte libre par lequel Il assume volontairement la douleur du monde et la peine des hommes. C’est comme si « Quelque chose » en Dieu, d’une manière transcendante, ineffable et souveraine, assumait la souffrance de la création.

Comment ? en rendant simultanées la souffrance et la victoire.
La souffrance acceptée, assimilée, illuminée, transfigurée devient alors la matière même dont Dieu tire son triomphe : par la passion du Christ renouvelée dans la « passion de l’Esprit ».



26 juillet 2006

Le sens de la souffrance

Retrouver le noyau vital, ce qui fait vivre.
Découvrir donc la force qui porte.
La supporter et, de ce fait, ne plus subir.
Se sentir libre.
Entreprendre de le rester....





Souffrir veut dire subir le mal. Dans son corps. Dans son âme. Dans sa vie.

Qui ne supporte rien est dans un état de douleur continuelle. Esclave de ses plaisirs du fait de la douleur du manque, il devient tyran des autres et du monde afin de combler ses manques.

On se voit souffrir. Cela augmente la douleur. « Qui accroît sa conscience accroît sa douleur », est-il dit dans la Bible. L’expérience le vérifie.

La douleur intéresse la science. Elle lui fournit des renseignements précieux.
Elle intéresse aussi l’artiste, qu’elle fascine par son esthétique.
On l’utilise constamment. En pédagogie. En morale. Dans la justice. Pour marquer les esprits, les faire plier ou les faire avancer.

Enfin, la souffrance intéresse la religion. Celui qui souffre comme le héros a un coté exemplaire, donc fondateur. Il fait avancer l’humanité dans le domaine des dieux et pas simplement dans celui des hommes.

On prétend que la souffrance grandit l’homme. Elle le brise le plus souvent, tant on apprend mal dans la douleur.
Cela vaut pour la religion. Dieu qui a créé la vie ne veut pas la destruction de celle-ci. La religion, qui prône la douleur pour payer ses fautes ou pour progresser, l’oublie. Elle transforme le Dieu de la vie en un Dieu de la mort, ivre de sang et de vengeance.

On imagine le bonheur comme étant l’absence de souffrance.
C’est l’inverse qui est vrai. Il n’y a pas de plus grand bonheur que de pouvoir souffrir au sens de supporter. C’est ainsi que l’on éprouve toutes les forces que l’on a en soi. …son sens ne réside pas dans le fait de justifier le mal que l’on subit, comme cela a tant été fait, mais dans celui de libérer les forces qui aident à ne plus subir.

Quand tel est le cas, une mutation s’opère. Le « pourquoi moi ? » que crie celui qui se sent injustement frappé par la vie se transforme en un «pourquoi pas moi ? ».

Bertrand Vergely

Adam et Eve

Il n'y a jamais eu d'Adam et Eve au paradis terrestre !

Ce jardin d'Eden, jardin de " jouissance " est au-dedans de tout être humain, de tout Adam - Adam est l'homme et la femme - lorsqu'il assume ses normes ontologiques, c'est-à-dire lorsqu'il se retourne au-dedans de lui-même et qu'il entre en communication avec Ishah, cette " autre " qui est en lui, son épouse intérieure.

Ishah, dans son union avec Adam, constitue un aspect du jardin d'Eden.

Lorsqu'il n'est pas tourné vers le dedans de lui-même et dans l'union avec Ishah, l'Homme est en exil ; dans cette situation dite " de chute ", d'exil, Ishah non épousée peut déterminer notre enfer ; elle est refoulée dans les profondeurs inconscientes et devient alors l'objet de la légende de Lilith, dite " la première femme d'Adam ".

Mais que signifie " première " lorsque la scène se joue en amont de l'exil, c'est-à-dire hors du champ de l'espace-temps historique ?

Dans cette situation d'exil, Ishah l'oubliée reste présente au-dedans de chaque être humain, jouant tantôt les inspiratrices, tantôt les démones.

Mais sur la scène historique de l'exil, Eve apparaît :

elle est la femme devant l'homme, qui prend le nom d'Adam ; Eve met au monde l'enfant dans le contexte animal qui nous est commun, mais qui ne constitue pas la vocation ontologique première du véritable Adam.

Toutes les traditions rendent compte du drame de cet exil :

Prométhée, chez les Grecs, dérobant le feu du ciel avant d'y être introduit ; son épouse, Pandore (dont le nom signifie " tous les dons ") ouvrant la boîte interdite et répandant sur le Terre des dons qu'elle ne sait gérer ; les hommes de la Tour de Babel tournant le dos à leur " Orient " et faisant une percée dans la plaine de Shinéar (celle " où l'on crie " et " où l'on titube "), tous sont comme Adam, prenant le fruit de l'Arbre de la Connaissance, que lui tend Ishah, au lieu d'attendre de le devenir lui-même.

Privilégions notre propre tradition et focalisons notre regard sur le Livre de la Genèse, que nos traducteurs ont lu à l'aide de leurs lunettes d'exilés.

Les deux premiers chapitres rapportent l'état d'Adam en amont de cette situation d'exil, dans un espace-temps autre que celui de notre commune expérience actuelle ; ils faussent donc d'entrée de jeu le discours.

" Au commencement Dieu créa les cieux et la terre ", disent-ils.

Il ne s'agit nullement du commencement historique.

Bereshit, ce mot qui, pour les Hébreux, contient toute la Torah, ce mot intraduisible peut être rendu au moins mal par " dans le principe ", en arche en grec, in principio en latin ; cette traduction est préférable, à la condition que nous comprenions que ce " principe " nous habite en chaque instant.

Cet " instant " - le kairos grec - se rapporte à l'espace de l'intériorité de l'Homme ; il est le seul moment du temps intérieur avec lequel puisse s'articuler le temps historique dans son présent - le chronos grec.


La langue grecque possède deux mots pour distinguer ces deux qualités du même temps :

l'instant de l'intériorité, lourd du " principe " divin fondateur de l'être, et l'instant du monde extérieur, dont la répétition banalisante structure le déroulement de l'exil, laissant l'Homme totalement inconscient, et de plus insatisfait !

Bereshit, ce " principe " en lequel tout est créé, est encore appelé par la Torah " l'Orient " de l'être, ou le " très antique ", mais un Orient qui appartient à la géographie de l'âme et un antique qui se trouve à ses origines ontologiques :

" Dans le principe Dieu créa... "

Ce temps passé du verbe créer convient tout aussi peu à l'oeuvre divine, qui se joue de toute éternité.

L'éternité n'a rien à voir avec la succession indéfinie de notre temps d'exil ; temps divin, l'éternité lui est totalement transcendante, mais lui devient immanente en chaque " instant " de l'intériorité, vécu en communion avec le " principe " divin de l'être.

Le Nom de " Elohim " est ici révélé pour désigner non pas la Personne divine, innommable, mais l'Innommable dans sa fonction créatrice.

Enfin, dans ces mots, " Dans le principe Dieu crée les cieux et la terre ", il s'agit de " cieux et terre " qui sont à l'intérieur de nous car, si le temps n'est pas celui de l'exil, l'espace n'appartient pas davantage au monde qui nous est extérieur.

" Cieux et terre " sont, en hébreu, shamaïm (shem, " le NOM " ; maïm, " les eaux "), et erets le " sec ".

" Dans le principe Dieu crée l'humide et le sec ", pourrait-on traduire, en précisant que l'humide est lourd du NOM, c'est-à-dire du Verbe divin qui fonde toute chose.

En Adam, l'Homme, qui sera dit plus loin " image de Dieu ", repose le NOM, " image de Dieu ", repose le NOM, image de Dieu, dans sa fonction d'Incarnation, YHWH, " JE SUIS ".

Chaque être humain est un germe de " JE SUIS ", un " JE SUIS en devenir d'être.. ", car tel est le NOM révélé à Moïse dans son expérience du buisson ardent (Exode 3,14).

" Je suis qui je suis " est une traduction faussée de ce verset, car le verbe être est employé ici, en hébreu, à la forme inaccomplie.

Ce NOM secret de chacun est au coeur des eaux comme un enfant dans le sein d'une mère.

Les eaux ne peuvent être saisies, elles symbolisent l'inconnu que les Hébreux appellent " l'inaccompli ", car elles recèlent un potentiel d'énergies infini destiné à être réalisé pour construire le NOM.

L'inaccompli est aujourd'hui comme l'inconscient ; par rapport à lui, la terre, le " sec ", serait le conscient.

La présence du shem (le NOM) dans les maïm (les eaux), sa puissance amoureuse et créatrice, est source d'une dynamique ontologique qui appelle les eaux à devenir du sec, l'inaccompli, de l'accompli, et l'inconscient, du conscient.


Cette dialectique fondamentale s'exprimera dans la suite du texte par :

" ténèbres-lumière ", ou encore " femelle-mâle ", dont nous allons découvrir le véritable sens.
Au Sixième Jour de la Genèse, Adam est en effet " créé Image de Dieu ", il sera " fait à sa Ressemblance ".

De l'Image à la Ressemblance s'inscrit la dynamique que je viens d'évoquer ; elle constitue la vie.

Les physiciens ne disent-ils pas que la vie est actualisation d'un potentiel d'énergies ?
L'énergie, disent-ils aussi, c'est de l'information.

Les informations qui habitent les shamaïm sont appelées à construire " l'Arbre de la Connaissance ", dont on ne peut dire qu'il est, dans son principe, celui " du bien et du mal ", mais plutôt celui " de l'accompli et du pas-encore-accompli ", ces deux pôles se rapportant au Germe divin que tout humain porte en gestation, à l'Orient de son être.

Dans la finalité de cet accomplissement, Adam est créé en même temps " mâle et femelle ".

Nos traducteurs n'ont vu en ces deux mots que l'homme et la femme dans leur nature animale, celle de l'exil.

Il est vrai qu'Adam est l'humanité toute entière, hommes et femmes, mais la dimension ontologique de cette double qualité est différente :
est " mâle " celui (ou celle) qui " se souvient " de sa " femelle ".
(Le mot hébreu zakhor recouvre le substantif " mâle " et le verbe " se souvenir ").
La femelle n'est autre que les shamaïm (les cieux), alors appelée adamah dans la fonction matricielle du shem (le NOM) qu'elle porte.

La adamah est mère (et mer) des profondeurs de tout être humain ; elle doit être cultivée - ce qui signifie qu'Adam doit faire oeuvre mâle en elle, en pénétrer chaque énergie, la nommer, la travailler, afin de construire l'Arbre de la Connaissance et de faire mûrir son fruit, le divin en l'Homme.

Adam a pour vocation de se mettre au monde ; dans ce sens, il a vocation de maternité.

L'Adam du Sixième Jour, encore confondu avec sa Adamah, baigne dans les eaux de l'inconscience ; les énergies de celles-ci, douées d'une vie autonome, jouent à la place de l'Homme et il ne le sait pas !

Ceci décrit la situation actuelle d'exil dans laquelle l'Homme est maintenu parce qu'il se détourne de lui-même et de Dieu.

L'Adam du Sixième Jour (et celui de l'exil) est incapable de travailler sa Adamah. " Il n'y a pas d'Homme pour cultiver la terre [Adamah] ", dit le texte du Septième Jour.

Nos traducteurs exilés ont déduit de ce verset de la Genèse l'inexistence de l'Homme, qui venait cependant d'être créé au Sixième Jour ; ils en ont conclu que ce deuxième chapitre de la Genèse constituait une autre Genèse, étrangère à la première ; et la critique historique d'aller bon train !

Or, ce deuxième chapitre de la Genèse décrit un jour où " Elohim se retire [shabbat] " pour que croisse YHWH, comme un père le fait devant un fils qui commence à affirmer son identité, car YHWH, JE SUIS, est l'identité réelle d'Adam, par laquelle il peut devenir conscient de lui-même.

En ce Septième Jour, un processus de différenciation s'accomplit entre Adam et sa Adamah ; l'Homme entre en résonance avec son noyau divin fondateur, il sort de son être collectif pour devenir sa personne et faire croître son arbre.

Elohim dit :
" l'Homme coupé de lui-même ne peut s'accomplir " (verset généralement traduit par :
" il n'est pas bon que l'homme soit seul ").

Elohim initie alors Adam à faire oeuvre mâle en lui-même, à nommer les animaux (énergies) de sa Adamah pour transmuter leur peau (ténèbres) en lumière (jeux de mots hébreux intraduisibles):
Elohim fait " communiquer " Adam avec lui-même dans des " face-à-face " incontournables pour son accomplissement.
Adam cherche le face-à-face total ; il est alors " endormi " d'un sommeil qui est en réalité un éveil, au coeur duquel Dieu lui montre la totalité de son autre côté.


Cet " autre côté " n'a jamais été une côte :

il est le côté " inaccompli ", donc encore voilé, de l'Arbre de la Connaissance qu'est Adam dans sa totalité ; il est " dressé " par Dieu, devant cet Adam, en " épouse ", Ishah, dont Adam est l'époux ; Ish.
Ishah est l'autre nom des shamaïm, les cieux, appelés Adamah en tant que mère des profondeurs et maintenant Ishah, " épouse " d'Adam.


Lorsque Adam découvre son épouse et l'enfant divin qu'elle porte, il vit une extase et s'écrie :

" Voici celle qui est os de mes os et chair de ma chair " ce qui en hébreu signifie : " Voici celle qui est la substance de ma substance [qui se tient cachée sous les apparences] et l'Image divine que je suis ".
Car la " chair ", basar, " scellée dans les profondeurs de cet autre côté " est l'Image divine fondatrice, constituée de bar, le " Fils " (le shem) et d'une présence secrète symbolisée par la lettre médiane de ce mot, le shin, première lettre du mot shem, le NOM, dont l'idéogramme primitif (flèche retenue au bout d'un arc tendu à l'extrême) exprime " l'esprit " qui est en l'Homme.

L'esprit est puissance de l'éros qui (départ de la flèche) rend capable l'accomplissement du Fils (le logos grec).

La puissance de l'éros est, dans le principe, celle du désir infini de l'Homme pour son Dieu, qui ne peut se traduire dans un premier temps que par ses épousailles avec Ishah ; elle est une pulsion de vie informationnelle car elle transforme les énergies potentielles de Adamah en informations - le conscient - ; elle fait croître la sève de l'Arbre de Connaissance dont Adam va devenir le fruit :

le Fils -JE SUIS - totalement accompli.

Ce Grand'Oeuvre est possible, puisque maintenant " Adam et son Ishah sont deux ; ils connaissent le chemin qu'ils ont à faire ; ils ne sont plus confondus " ; ce verset, à un premier niveau de lecture est traduit par :

" ils étaient tous les deux nus et ils n'en avaient pas honte ".

C'est à cette hauteur du mythe qu'intervient, au milieu de tous les animaux (les énergies) intérieurs d'Adam," le serpent, Le plus rusé de toutes les énergies ".

Ici, la racine du mot hébreu arom " rusé ", est aussi celle du mot qui vient de qualifier Adam et son Ishah et que l'on a traduit par " nu " au verset précédent.

Le serpent doué de savoir et de savoir-faire est une émanation du Satan, l'Adversaire ; il va tenter de déstabiliser Adam en s'adressant à son épouse Ishah.

Ishah prend le fruit de l'Arbre de la Connaissance que lui tend le serpent-Satan ; elle le donne à son époux qui le mange.

Adam entre alors dans l'illusion totale d'être devenu JE SUIS ; ce " je " illusoire est l'ego du monde de l'exil, qui se trouve alors en relation avec l'extérieur des choses et d'Adam lui-même, mais coupé de l'intérieur, coupé d'Ishah dont il croit qu'elle est devenue sa totale lumière.

Réduit à l'état animal du Sixième Jour, Adam n'est plus que l'homme devant la femme alors seulement appelée Eve.

Eve devient mère biologique dans le monde extérieur alors que c'était à lui Adam, de devenir mère ontologique, mère du Fils intérieur, JE SUIS.


© Annick de Souzenelle

Du sublime dans l'abîme - Va vers toi !





L'histoire humaine est terrible, non parce qu'elle est vide, mais parce que l'humanité est promise à la grandeur. La détresse qui la frappe en est le signe. En montrant ce qui a été perdu, elle est la mémoire du sublime dans l'abîme.



Petite philosophie pour jours tristes
Bertrand Vergely







Détresse

Pourquoi Dieu laisse-t-il faire le massacre des enfants ? demande Ivan dans les Frères Karamazov de Dostoîevski. Cette terrible interrogation peut recevoir un début de réponse. Quand les hommes ne font pas de grandes choses, ils font de terribles choses. Quand ce n'est pas leur coeur qui est grand, c'est leur cruauté qui l'est.

On se scandalise de la détresse régnant dans le monde, quand la grandeur perdue de l'humanité crie en nous. Si la mémoire de cette grandeur n'existait pas, nous n'aurions pas le sens de l'injustifiable qui nous fait hurler.

Se révolter, en ce sens, contre l'idée d'une grandeur de l'homme, sous prétexte que l'horreur existe, est une profonde erreur. Il faut se servir de la mémoire de l'homme pour attaquer l'horreur existante et non se servir de l'horreur existante pour attaquer la mémoire de l'homme.

Aliénation

Pascal a pensé qu'il faut un changement intérieur et pas seulement extérieur pour soigner l'humanité. C'est la raison pour laquelle il a parlé de folie concernant celle-ci. Il a voulu signifier qu'il faut plus qu'une science face au mal qui accable les hommes. Une mutation de la personne s'impose.

Venant du latin alienus, l'aliénation caractérise le fait de devenir étranger à soi. Il s'agit là d'une formule heureuse permettant de comprendre la situation humaine consistant à ne plus être ce que l'on est sans avoir pourtant perdu son être.


Va vers toi !

Dans le récit biblique, l'homme n'est ni mauvais par nature ni maudit par Dieu. Il est devenu étranger à lui-même. D'où sa situation d'exil, ainsi que le rappelle Annick de Souzenelle dans l'Egypte intérieure ou les Dix Plaies de l'âme.

Face à une telle situation, il n'y a qu'un remède. Celui que donne Dieu à Abraham, quand il lui dit : "Va vers toi ! " Profonde parole. Il faut retrouver son être intérieur. Celui qui non seulement "est", mais qui est capable de devenir.

Vrai visage de toute joie




Le sage est invulnérable, alors il est visité par une joie que rien ne peut plus troubler.

Mais quelle est cette joie qui l’habite ? L’expérience même du mystère qu’il semble avoir atteint le taraude et le plonge dans une attente indéfinissable. La nostalgie la plus indicible hiverne au creux du sourire de Bouddha et dans les vertiges de Socrate buvant la ciguë...

Hiver de l’attente, car le coeur de l’homme ne peut être dans la plénitude sans la rencontre définitive, qu’est le visage du Christ, vrai visage de toute joie.
Le Mandylion

C’est pourquoi la joie des sages, comme d’ailleurs toutes nos joies à nous tous, quel que soit leur humble degré d’accomplissement, sont cette présence voilée du Christ, qu’on le sache ou non.

Ainsi peut-on voir la venue du Christ à l’oeuvre, se frayant son chemin vers l’homme à travers toutes ses joies. Elles sont toutes une annonce de sa venue. Mais la plénitude n’est que dans le face à face.

Si la joie est seulement un sentiment, alors à quoi bon ? Ce " malheur " (mal heureux), inhérent à la joie des sages, ne se résout que par la rencontre de la joie comme Personne, elle est Quelqu’un et l’homme, chacun de nous, ne peut se réaliser que dans la relation avec lui, en entrant dans sa joie à lui : Entre dans la joie de ton Maître, dit le Christ (Mt 25,21). Ici réside la nouveauté fantastique du Christianisme que ne pouvait soupçonner aucun sage de l’humanité et dont la joie pourtant était l’annonciatrice inconsciente, et dont chacune de nos joies aujourd’hui encore est porteuse...

Père Alphonse

La naissance de Jésus


Seulement deux des quatre Evangiles abordent la naissance de Jésus : ceux de Matthieu et de Luc. Marc n'en dit rien. Jean révèle brièvement, mais avec une densité exceptionnelle, le mystère de l'incarnation : «La Parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité» (Jean 1:14). Il faut donc se pencher sur les textes de Luc et de Matthieu qui, se complétant, permettent de reconstituer les faits dans leur succession chronologique.


1. L'annonce à Marie :
Luc 1 :26-38

Aux premiers mots que l'ange Gabriel lui adresse, Marie est troublée, comme toute fille du peuple l'aurait été devant une telle manifestation surnaturelle. Il la rassure aussitôt et lui révèle la grâce que Dieu lui accorde : enfanter un fils qu'elle devra nommer Jésus, qui sera grand, appelé Fils du Très-Haut et destiné à régner éternellement...

Mais Marie est vierge, fiancée certes, et cela au sens strict du terme. Alors elle s'interroge logiquement... Comment cela se fera-t-il ? Cependant, l'ange lui précise que le Saint-Esprit opérera en elle le miracle sans précédent de la conception par la puissance du Très-Haut. En conséquence, Jésus sera appelé Fils de Dieu.

Gabriel, pour confirmer qu'en effet rien n'est impossible à Dieu et encourager Marie à croire, révèle à celle-ci que sa parente Elisabeth, âgée et réputée stérile, est, de son côté, par la volonté du Très-Haut, enceinte de six mois.

Et là se situe le moment clé, suscité par Dieu «qui produit en nous le vouloir et le faire» (cf. Philippiens 2:13). Marie croit et se soumet totalement à la volonté divine : «Je suis la servante du Seigneur; qu'il me soit fait selon ta parole !»

Attitude exemplaire, qui ouvre toute grande la porte à la bénédiction. Voilà un témoignage de foi remarquable que Marie nous a donné et dont tout chrétien doit s'inspirer.
Une remarque : l'ange dit que Dieu donnera à Jésus «le trône de David, son père». Bien que Joseph, fiancé de Marie, ne soit pas intervenu physiquement dans la conception miraculeuse, les généalogies de Matthieu 1 et Luc 3 font passer par lui la descendance qui rattache le Messie à David et Abraham. On verra plus loin comment, par sa foi et son obéissance, le père protecteur, nourricier et éducateur de Jésus intervint aussi, de façon décisive, dans le déroulement du plan divin.

Les Evangiles ne disent rien de l'ascendance familiale de Marie. Il est cependant permis de penser qu'elle aussi était de descendance davidique, car Paul écrit, en Actes 13:23: «C'est de la postérité de David que Dieu, selon sa promesse, a suscité à Israël un Sauveur, qui est Jésus.»
Matthieu, dans sa généalogie, cite seulement Marie comme «épouse de Joseph». Ainsi, la filiation humaine qui donne à Jésus la qualité de Fils de l'homme, se trouve placée au second plan par l'Ecriture.


2. Visite de Marie à Elisabeth :
Luc 1:39-56

Informée par l'ange Gabriel du miracle opéré par Dieu en Elisabeth, devenue féconde malgré sa vieillesse, Marie va aussitôt rejoindre sa parente. La hâte qu'elle y met est significative de sa foi. Marie, dès le seuil de la maison de Zacharie, salue Elisabeth. Elle n'a pas le temps de dire autre chose. L'enfant conçu de six mois (le futur Jean-Baptiste) tressaille dans le sein de sa mère.

Simultanément, le Saint-Esprit descend sur Elisabeth et la remplit. Sans avoir été, au préalable, informée de quoi que ce soit, elle prophétise. Ses paroles, prononcées d'une voix forte, affirment avec puissance :
– la bénédiction de Dieu sur Marie et l'enfant qu'elle porte,– la grâce que constitue la visite de Marie,
– le fait que l'enfant porté par Marie est le Seigneur personnel d'Elisabeth,– que le tressaillement de l'enfant porté par Elisabeth est le signe d'authenticité donné par Dieu quant aux affirmations précédentes,
– que la foi de Marie est sujet de joie, car elle constitue la clé de l'accomplissement des choses promises. Marie, à son tour, animée par l'Esprit saint, prononce alors une admirable louange prophétique.

L'exaltation et la joie en marquent les premiers mots. Marie constate «sa bassesse», reconnaît son état naturel de perdition et son besoin personnel de salut, puisqu'elle qualifie Dieu de «mon Sauveur». Toutes les générations la diront bienheureuse, non à cause de ses propres mérites, mais en raison des grandes choses que le Tout-Puissant, par grâce, a faites pour elle. Elle est, en effet, bénéficiaire d'un miracle sans précédent dont les conséquences s'étendent à l'humanité tout entière.

Marie affirme ensuite avec force l'un des principes divins fondamentaux : la crainte de Dieu est, d'âge en âge, la clé de sa miséricorde, ceci en raison de la sainteté du Tout-Puissant. La puissance divine disperse les orgueilleux, renverse les puissants, dépouille les riches, mais elle élève les humbles et rassasie les affamés.

C'est exactement ce qu'enseignera et fera Jésus.
Dieu secourt Israël par l'incarnation de son Fils, de façon décisive et définitive, selon la promesse qu'il avait faite à Abraham et à sa postérité. Preuve évidente de sa fidélité.

Cette intervention simultanée de l'Esprit saint en Elisabeth et Marie est comme un double coup de trompette qui annonce l'entrée du Messie au sein de l'humanité. Par une femme trompée (Eve), Satan en Eden avait à l'origine réussi sa pénétration dans le monde, y introduisant le péché et la mort. Par deux femmes, librement acquises à la foi sous l'impulsion de l'Esprit, Dieu affirme son intervention libératrice, porteuse de vie. Marie est un élément fondamental dans la réalisation du plan de Dieu. Mais elle n'en est sans doute guère consciente, et elle se soumet simplement à l'ordre de Dieu.


3. L'annonce à Joseph :

Matthieu 1 :18-24

Joseph, homme de bien, fiancé de Marie, apprend de celle-ci qu'elle est enceinte dans des conditions sans précédent. Devant cette situation inouïe, infamante à ses yeux, il se résout à rompre. Mais il envisage de le faire secrètement, sans éclat, sans que le scandale s'ébruite sur la place publique. Car, si la chose était connue, Marie serait exposée à la lapidation par les Juifs, conformément aux prescriptions de la loi (Deutéronome 22:20 – 21).

Joseph ne veut pas avoir sur la conscience la mort de celle qu'il aime... Alors que ces pensées l'assaillent, un ange du Seigneur lui apparaît en songe. Il le tranquillise et lui ordonne de prendre Marie pour femme, car elle ne l'a pas trompé. L'enfant qu'elle porte a été conçu miraculeusement par le Saint-Esprit de Dieu.

Joseph reçoit aussitôt mission de donner à l'enfant le nom de Jésus, car il sauvera son peuple (Israël) de ses péchés. Matthieu précise que ces faits sont la réalisation de la prophétie d'Esaïe 7:i4 : «Voici, la vierge deviendra enceinte, elle enfantera un fils, et elle lui donnera le nom d'Emmanuel» (Dieu avec nous).
Sitôt réveillé, Joseph, mû par la foi, fait sans hésitation ni réticence ce que l'ange du Seigneur vient de lui ordonner. Il prend avec lui Marie pour en faire sa femme. Mais, et la précision est d'importance, il ne la connaît point (c'est-à-dire qu'il n'a point de relation sexuelle avec elle) jusqu'à la naissance de l'enfant promis. Lorsque celui-ci voit le jour, Joseph lui donne le nom de Jésus. Il devient son père adoptif.

Marie n'a donc été vierge que jusqu'à l'accouchement à Bethléhem. Ensuite, elle a eu la vie normale d'une femme mariée. Joseph est devenu son époux au plein sens du terme. De plus, seul avec sa jeune épouse, Elisabeth et Zacharie, à connaître le mystère de l'incarnation, il protégera la respectabilité de Marie devant les hommes. Il sera «comme on le croyait» père de Jésus (généalogie de Luc 3:23).

4. Naissance de Jésus :
Luc 2:1-7

Le recensement ordonné par César sur toute l'étendue de l'empire romain amène Joseph, désormais chef de famille, accompagné de sa fiancée (mais officiellement sa femme, d'autant qu'elle arrive au terme de sa grossesse), à se déplacer de Nazareth où ils résident, à Bethléhem. C'est en effet de cette seconde ville que sont originaires ses ancêtres, descendants de David.
C'est là, dans une simple crèche, que Jésus naît, car en raison de l'affluence momentanée, toutes les hôtelleries sont bondées.

Marie, jusqu'à ce jour, n'a jamais «connu» d'homme. C'est donc bien une vierge, fait hautement miraculeux, qui vient d'enfanter. Le texte évangélique met en lumière l'ascendance davidique de Joseph. Bien que n'étant pas le père naturel de Jésus, le voilà placé au premier plan.


5. L'annonce aux bergers :
Luc 2:8-20


Un nouveau miracle, immédiatement consécutif à la naissance de Jésus, se produit au soir de ce jour mémorable. Un ange de Dieu, dans la gloire resplendissante, apparaît soudain à des bergers qui gardent leurs troupeaux. Ces hommes, surpris, sont terrorisés et ne savent que penser. Mais l'ange les rassure aussitôt.

Il vient leur apporter une bonne nouvelle qui causera une grande joie à tout le peuple juif : aujourd'hui, à Bethléhem, la ville de David, un Sauveur vient de leur naître ! C'est le Christ, c'est-à-dire le Messie qu'attendent tous les Israélites pieux. Et l'ange leur donne des indications précises pour le reconnaître : le petit enfant, emmailloté, est couché dans une crèche. Fait inhabituel, car la litière est normalement réservée au bétail.

Puis la multitude des anges (l'armée céleste) fait résonner sa louange et proclame la paix parmi les hommes approuvés de Dieu.
Aussitôt, les bergers décident unanimement de se rendre à Bethléhem pour voir ce qui vient, de façon si miraculeuse, de leur être annoncé. Partis en hâte, ils trouvent Marie, Joseph et le petit enfant couché dans la crèche.

Ainsi, Dieu, par son intervention, suscite les premiers témoins de l'Evangile: d'humbles bergers anonymes. Ayant vu le bébé, ils racontent près de la crèche de quelle façon surnaturelle ils ont été divinement avertis de sa naissance et du lieu où ils le trouveraient. Tous ceux qui les entendent sont étonnés. L'attention des Israélites se trouve, de la sorte, attirée sur l'enfant qui vient de naître. Marie, quant à elle, est frappée plus encore que quiconque par la succession et les recoupements des faits. Sachant ce qu'elle sait, elle récapitule et retient tous ces événements miraculeux, émerveillée devant de telles démonstrations de la puissance et de l'omniscience de Dieu.

Les bergers, de leur côté, retournent vers leurs pâturages. Mais ils le font en témoins enthousiastes, dans la louange. Dieu ne les a pas trompés : ce qu'ils ont vu et entendu à la crèche était bien conforme à l'annonce de l'ange.
Dans ces circonstances, Marie n'a qu'un rôle passif. Les révélations se manifestent en dehors d'elle. Elle en enregistre l'accomplissement. Déjà, les événements la dépassent.


6. La visite des mages :
Matthieu 2:1 – 12


Les mages d'Orient, savants astrologues rompus à l'interprétation des phénomènes naturels, ont observé dans le ciel une nouvelle étoile dont l'éclat exceptionnel a captivé leur attention. Ils en déduisent que «le roi des Juifs vient de naître», car l'astre brille en direction de la Judée. Leur sens divinatoire ne les trompe pas. Alors, ils vont chercher de plus amples renseignements à la source et arrivent à Jérusalem.

Là, c'est au sommet qu'ils s'informent spontanément, auprès du souverain régnant, Hérode. Où, mieux qu'au palais, peut-on prendre des nouvelles d'un roi nouveau-né ? Notons au passage que la divination ne les a qu'incomplètement avertis.

On comprend l'émoi d'Hérode, le cruel despote, collaborateur de l'occupant romain. Dans la bouche des «sages» venus de l'Est, l'annonce de la naissance du «roi des Juifs», un rival inattendu, prend une inquiétante résonance. Avec le souverain, tout ce que Jérusalem compte de notables influents, plus ou moins liés à la cour, s'émeut, se sentant menacé du même coup. Hérode convoque rapidement les savants du peuple : les principaux sacrificateurs et les scribes, versés dans les Ecritures, pour s'informer auprès d'eux du lieu où le Christ devait naître. Le roi sait bien où trouver les indications fiables concernant le Messie...

Aucune hésitation de la part des spécialistes consultés. Ils répondent aussitôt : «A Bethléhem, en Judée», selon la prophétie de Michée 5:1 (énoncée sept cent cinquante ans plus tôt !).
Hérode ne doute pas un instant de la chose. Il prend perfidement à part les mages et s'informe avec soin auprès d'eux du moment où l'étoile a commencé à briller. Puis il les envoie à Bethléhem, leur demandant de lui amener des informations exactes sur le petit enfant, car, dit-il, je veux aussi aller moi-même l'adorer.

Enorme mensonge ! Hérode est, en réalité, résolu à supprimer l'enfant, qu'il considère comme une grave menace pour son trône... Et voilà nouée la première coalition des ennemis implacables de Jésus : les pouvoirs religieux et temporel juifs. Ces hommes influents ne sont, de fait, que les jouets inconscients d'une puissance qui les domine : celle de Satan, qui tente dès l'origine d'arrêter l'œuvre divine du salut. Et comme il est meurtrier dès le commencement...

Et les mages, ne se doutant pas du processus destructeur qu'ils viennent de déclencher sans le vouloir, partent pour Bethléhem. L'étoile va les guider jusqu'à la maison. Ils y voient le petit enfant avec Marie, sa mère. Ils se prosternent devant Jésus et l'adorent, en reconnaissance de sa royauté. Puis, les mages ouvrent leurs trésors : or, encens et myrrhe. Présents prophétiques, en vérité. L'or annonçant le royaume, l'encens le sacerdoce et la myrrhe, la mort expiatoire.
Ces cadeaux de grande valeur seront précieux à Joseph et Marie pour effectuer, ultérieurement, leur voyage et leur séjour en Egypte. Ici se place une nouvelle intervention miraculeuse du Seigneur. Les mages vont repartir. Passeront-ils par Jérusalem, pour renseigner le roi Hérode, comme il le leur a demandé ? Non, car Dieu les avertit en songe de ne pas le faire. Et, comme il est maître de toutes choses et produit en nous le vouloir et le faire, il persuade les savants astrologues de retourner dans leur pays par un autre chemin.

Plus tard, Hérode, furieux d'avoir été joué par les mages (en réalité par Dieu), ordonnera le massacre des innocents en bas âge, croyant ainsi supprimer parmi eux son rival exécré. Il se montre ainsi, de façon évidente, l'instrument de Satan.

On remarquera qu'à l'occasion de la visite des mages, Marie est seulement citée. C'est à Jésus, non à elle, que l'adoration et les présents sont offerts. Si la visite et le témoignage des bergers l'avaient profondément touchée, ici Matthieu ne dit rien de ce qu'elle ressentit. L'étonnement, sans doute, devant la venue de ces étrangers riches et puissants, et leurs prodigieux présents. Mais Marie n'a pas discerné le danger qui, derrière ces apparences flatteuses, pesait sur son saint enfant. On le verra plus loin.
Ainsi, la visite des mages, dont Matthieu ne donne ni le nombre, ni les noms, constitue le premier hommage des païens à Jésus. Elle constitue aussi, parallèlement, la première attaque en règle de l'ennemi. La fuite en Egypte va s'ensuivre.